mardi 21 janvier 2014

[Chronique] Lvcifyre – Svn Eater

Je vais vous parler franchement, si ce disque n'avait pas eu une magnifique pochette signée Timo Ketola et qu'il n'était pas sorti chez l'excellent label américain Dark Descent Records (des spécialistes du Death souvent occulte et über méchant), jamais je n'aurais écouté cet album sur la seule base de leur nom, mais putain quoi, déjà, le jeu de mot, c'est plutôt moyen, et ça fait plus groupe Emo-Goth que Death Metal, en plus de cela, le groupe ajoute l'insulte à l'infamie en remplaçant les U par des V, c'est vrai que c'est beavcovp plvs Trve Kvlt comme ça, et le Fyre là, avec un Y, c'est parce que c'est du feu plus Evil? ça brûle avec plus d'intensité orthographié ainsi?
Donc ouais, Lvcifyre n'est pas un groupe de goth, mais une bande de joyeux drilles œuvrant dans un Death br00tal, poisseux, malsain et plutôt technique, Svn Eater étant le deuxième album de ces anglais (ils vivent en Angleterre, mais je crois avoir cru comprendre qu'ils étaient plutôt polonais) après un The Calling Depths sorti en 2011, disque que j'ai récemment écouté vu que je ne connaissais pas le groupe avant la semaine dernière et que j'ai trouvé plutôt sympathique, enfin, façon de parler, car la musique de Lvcifyre est tout sauf sympathique ou amicale, chaos et destruction sont au programme, avec une certaine esthétique de la laideur...

Ah! comme s'il ne suffisait pas que le groupe se ballade avec un patronyme kikoo, je tiens à vous signaler que les gars se nomment T. Kaos, Menthor, Kvltvs et Dictator (Facepalm...), voilà voilà, je n'ai même plus de mots, je vous laisse seuls juges des noms de scène de ces gens, j'abandonne.
Passons sur ces détails, et concentrons nous plutôt sur la musique, car c'est bien là où Lvcifyre ne fait pas sourire du tout, leur Death étant tout ce qu'il y a de plus sérieux et intense, pour vous faire une idée, c'est un peu comme si l'écrasante lourdeur d'un Morbid angel rencontrait l'espèce de Tech-Drone d'un Portal, et histoire de rendre le truc encore plus malsain, une bonne louche de Black a été incorporée à la tambouille, imprégnant chaque rouage de la mécanique, ce qui nous donne un Svn Eater incroyablement heavy et chaotique, et par dessus le marché, j'ai comme le sentiment que Lvcifyre n'a que faire de plaire à l'auditeur tant tout ça est jusqu'au-boutiste dans la violence et la laideur.
J'en veux pour preuve le premier titre de la galette, Night Sea Sorcery, car Lvcifyre a décidé de commencer son album par le morceau le plus long, le plus malfaisant, et le plus bizarre des neufs proposés ici, comme si d'emblée ils souhaitaient nous dire d'aller gentiment nous faire foutre, ce truc de neuf minutes débutent donc par cinq longues minutes pesantes et poisseuses, c'est lent, l'atmosphère est constamment menaçante, le "chant" en forme de discours est presque Black, et après cette introduction, petite session de matraquage plus Death qui conserve malgré tout une grosse vibe Black Metal à la Darkthrone, et ce n'est qu'après un nouveau petit break nauséabond que le groupe va tout défoncer durant les deux ultimes minutes, un premier titre particulièrement douloureux et malsain, quasiment apocalyptique, qui se révèle presque en décalage avec le reste de l'album, qui sera beaucoup plus brutal et dans un format plus "normal" de 4-5 minutes en moyenne.
Chalice of Doom change la donne, ici, c'est de l'ultra violence, à la rapidité insensée et au riffing frénétique, on a presque l'impression d'entendre un Mitochondrion défoncé au speed, les leads sont fantomatiques, déstructurées, le batteur Menthor (le déclic fraîcheur...) est explosif et imposant, ça blast dans tous les sens et l'on se mange un paquet de Menthorgnoles dans la gueule, il faut noter que le chant est plutôt versatile, T. Kaos dispose d'un growl caverneux, dégueulasse, assez profond, bien aidé par Mark of the Devil (dans la catégorie nom de merde...), vocaliste des blackeux polonais de Cultes des Ghoules, qui apporte une diversité appréciable.
La grande force de Lvcifyre, c'est de proposer un Death teinté de Black, ultra brutal, massif, technique, qui conserve toute son intensité et qui n'est jamais véritablement chiant ou indigeste, ce qui n'était pas gagné sur un album de cinquante minutes, ce qui est long pour une musique aussi épuisante, ici, Lvcifyre parvient à ne jamais véritablement tourner en rond, chaque titre a son mouvement qui lui est propre, les titres sont globalement rapides, avec quelques ralentissements, notamment un Nekuomanteion heavy et dévastateur, les breaks et les changements de rythme sont nombreux (le titre Sun Eater), mais sans jamais trop en faire, les structures n'étant jamais trop complexes, avec en plus quelques petites touches atmosphériques par-ci par-là, tous les titres ont d'ailleurs droit à une petite introduction d'une dizaine de secondes qui met dans l'ambiance et qui permet surtout de faire une petite pause entre les morceaux, ce qui est une bonne idée, de quoi reprendre son souffle entre deux mandales dans la gueule, car même si Lvcifyre joue sur quelques atmosphères, il n'en reste pas moins une bête furieuse lancée à toute vitesse et qui pulvérise tout sur son passage, il faut dire aussi que durant 50 minutes, Svn Eater va se constamment se montrer hostile envers l'auditeur, les structures sont chaotiques, mais le tout fonctionne avec fluidité, les mélodies sont globalement absentes et les riffs intriqués, qui rappellent souvent Inquisition, n'aident pas rendre l'album facilement séduisant, chacun des titres étant plutôt un défi lancé à l'auditeur, aucune concession n'est faite, Lvcifyre pulvérise, écrase, et son Death/Black est véritablement cauchemardesque et infernal, un tourbillon de violence extrême du début à la fin, sans temps-morts, en maintenant constamment le même niveau d'intensité et de qualité...

Bien sûr, le jusqu'au-boutisme dans la violence de Lvcifyre est un peu rebutant au premier abord, Svn Eater n'est pas du tout un disque facile d'accès, il se montre constamment hostile et malsain, et s'apprivoise difficilement, mais c'est justement ce côté sans concession qui est le plus attirant chez le groupe, l'ensemble est brutal, très brutal même, et diablement occulte, pour un savant mélange de violence et d'atmosphères, agressif, étouffant, mais impeccablement exécuté, un excellent Death occulte et brutal, dégoulinant de violence putride...
L'album est en écoute intégrale sur Bandcamp: http://darkdescentrecords.bandcamp.com/album/svn-eater

Infernal et implacable
Track Listing:
1. Night Sea Sorcery
2. Chalice of Doom
3. Liber Lilith
5. In Fornication Waters
7. The Fiery Spheres of the Seven
8. Fyre Made Flesh
9. The Sinister Calling