mardi 8 octobre 2013

[Chronique] Trivium - Vengeance Falls

Aaaah les affres de l'adolescence, la première clope, la première bière, les hormones qui s'agitent et les premiers touches-pipi avec la p'tite Céline dans l’obscurité rassurante d'une salle de cinéma devant Twilight, et cette propension à la transgression des règles, donc un jour, pour te différencier, et faire chier les parents aussi, toi le jeune ado rebelle, tu décides d'écouter du Metal, en plus c'est cool, avec les longs cheveux gras, on ne remarquera plus trop ton acné.
Bref, c'est bien joli tout ça, écouter du Metal, mais t'as à peine quinze ans et t'y connais que dalle, mais t'as fait des recherches sur les internets et donc, évidemment, t'es tombé sur le premier Gateway band venu, ça a toujours existé ce genre de groupes, c'est un peu Mon premier groupe de Metal par Fisher-price, ce sont les groupes à la mode qui attirent un public jeune par une musique accessible et simple, dans l'air du temps, avec souvent un look et une imagerie plus travaillés que leur musique, à une époque, c'était Korn et Slipknot, aujourd'hui, tu as le choix entre Bullet for my Valentine, Avenged Sevenfold et Trivium, donc des groupes de Metalcore qui aimeraient bien devenir le nouveau Metallica de la décennie, y'a suffisamment de riffs et de solos pour faire chier tes vieux, ça gueule mais y'a du refrain pop ultra catchy, et leur t-shirt sont jolis, bref, t'as trouvé ta voie.
Trivium donc, c'est un des nombreux gateway bands actuels, pourtant, à la différence de BFMV ou d'A7X (le jeune aime les acronymes), Trivium a toujours joué plus dur (même si eux aussi ont plus ou moins discrètement pompé Metallica et Maiden), sonnant presque plus Metal que les autres, ce qui n'empêche pas les puristes et les trve de leur chier dessus dès qu'ils en ont l'occasion, un peu injustement, car Metalcore ou pas, Trivium a sorti des trucs pas trop mal, Ascendancy notamment, et en 2011 un In Waves correct mais très inégal, qui faisait oublié quelque peu les errements de The Crusade et de Shogun, et puis voilà Vengeance Falls, le nouveau venu, qui nous présente un groupe en pleine évolution...

Quoi? Trivium évolue?
...
Et Trivium évolue... en Disturbium!!!!

Aïe, ça part mal cette affaire...
Car pour cette sixième offrande, les floridiens ont choisi de s'associer à David Draiman, le maître du Nü-Metal des red states, désormais producteur durant la pause de Disturbed, ce qui n'est jamais de bon augure, rappelez-vous, la dernière fois qu'on a parlé de Draiman sur ce blog, c'était pour sa participation au naufrage du dernier Megadeth.
Donc voilà, peut-être que Matt Heafy et ses potes se sont finalement rendu-compte qu'ils ne deviendraient jamais le nouveau Metallica (de toute façon, Avenged Sevenfold se charge déjà d'être le Metallica du pauvre et des adolescentes en chaleur), et qu'il était en fin de compte bien plus facile de devenir le nouveau Disturbed, pas con.
Bref, Vengeance Falls, c'est du Metalcore radio-friendly easy-listening qui sonne comme du Disturbed, après tout, c'est produit par Draiman, qui s'est chargé de remodeler le son du groupe, prédominance du chant clair, quasiment plus de growls, des refrains pop téléphonés que t'as déjà entendu mille fois, des structures simples, pour ne pas dire simpliste, Trivium nous sert une véritable collection de hit faciles.
De la grosse soupe commerciale fadasse alors?
C'est à peu près ça, mais pas seulement, car contrairement au Hard Rock dégueulasse d'Avenged Sevenfold, Trivium demeure malgré tout très orienté Metal dans l'esprit, toujours influencé par Metallica et le Power Metal américain, mélange de Metalcore et de Thrash mélodique, on y retrouve du gros riff dynamique, des solos de haute voltige, pour des titres plutôt véloces au final, facilement assimilables, avec cette recherche constante du hit à tout prix, surement l'influence de Draiman, mais malheureusement, vous vous doutez bien que tout ça est ultra calibré et facile, et plus que la musique en elle-même, c'est le chant qui est ici défaillant.
C'est ainsi que passé à la moulinette Draiman, Trivium se retrouve dépouillé de tout son caractère abrasif, et du growl aussi, car c'est le chant clair qui se taille la part du lion, il y a bien quelques hurlements par-ci par-là, mais dans le fond, souvent doublant le refrain, et quand il revient au premier plan, c'est pour nous proposer l'alternance classique chant clair/Growl typiquement Metalcore à deux balles comme sur No Way to Heal, difficile de faire plus stéréotypé et plus impersonnel que ça.
Dès le premier titre, Brave This Storm, j'ai dû vérifié si je m'étais pas planté d'album tant Trivium se vautre honteusement dans tous les gimmicks de Disturbed, riff haché un peu neo sur les bords, et surtout la manière de chanter de Matt Heafy, qui livre ici sa plus belle imitation de Draiman, le refrain est bien sûr ultra catchy, le titre est ultra classique, ça bourre gentiment, on note quand même une production excellente, énorme, après tout, Draiman connait son affaire sur ce point-là, mais tout ça sonne bizarrement inoffensif, aucune intensité, on se demande même pourquoi y'a du growl qui se balade dans le fond alors qu'il n'a rien à faire là, et le pire c'est que presque tout l'album est comme ça, cousu du fil blanc, un bête blockbuster qui en mais plein les yeux, mais grattez la grosse couche de vernis qui brille et y'a absolument rien derrière.
Le groupe nous sert donc ses petits titres sans envergure, lisses, aux refrain faciles, entre le Neo de disturbed et le Metalcore Thrashy, Vengeance Falls, To Believe, Through Blood and dirt and Bone, No way to heal, avec juste suffisamment de hargne pour rester ancrer dans le Metal malgré tout, Strife donne dans des sonorités empruntés à Maiden et Metallica, un grand classique du groupe depuis les débuts, At the end of this War est quand à lui un titre tout ce qu'il y a de plus banal et plat; Bien sûr, ce qui sauve un peu la mise, ce sont les solos et la technicité du truc, pour le coup, Trivium s'en sort toujours aussi bien quand il s'agit de proposer des enchaînements fluides, et c'est vers la fin de l'album qu'un retrouve enfin la facette un poil plus sombre de Trvium, surtout Incineration: The Broken Word qui voit le groupe renouer avec une certaine intensité avec des growls plus présents, mais c'est bien peu, ce n'est pas ici que vous allez trouver un truc brutal comme Dusk Dismantled.
Le plus pénible au fur et à mesure des écoutes, c'est le chant d'Heafy, dont le chant clair est loin d'être varié, ne faisant passer que très peu d'émotion, et comme la plupart des titres reposent sur lui, on a vite fait de le trouver lourdingue, et les couplet ont souvent les même tics vocaux empruntés à Disturbed, ce qui est loin d'être une bonne idée, de la même manière, les refrains sont ultra calibrés, faciles, un peu à l'image de l'album en fin de compte...

Il est pas mauvais Vengeance Falls en fin de compte, il est juste banal.
J'imagine qu'il en faut pour tous les goûts, et si vous aimez que votre Metal soit calibré, lisse, facilement consommable, assimilable sans effort dès la première écoute, foncez, Trivium est fait pour vous, et Vengeance Falls est un admirable produit de consommation courante, avec des refrains énormes comme l'exige le cahier des charges, c'est juste suffisamment violent pour faire chier ta mère sans pour autant l'effrayer.
Personnellement, je trouve ça plus que léger, Trivium cède à la facilité et applique tranquillement la méthode Draiman du hit single factice, et même si ça sonne plus Metal que du Disturbed, les ficelles sont malgré tout énormes et bien trop visibles, c'est dommage de voir un groupe aussi compétent et capable de bien mieux emprunter ce genre de raccourcis et utiliser des formules toutes faites comme c'est le cas ici, même si j'imagine que la priorité du groupe est de se développer et d'atteindre un public bien plus large, il fallait donc adoucir le propos et produire un blockbuster évident, structures simples, refrains foireux, la recette du succès...

Disturbium!
Track Listing:
1. Brave This Storm
2. Vengeance Falls
3. Strife
4. No Way to Heal
5. To Believe
6. At the End of This War
7. Through Blood and Dirt and Bone
8. Villainy Thrives
9. Incineration: The Broken World
10. Wake (The End is Nigh)