mercredi 4 septembre 2013

[Chronique] Nephren-Ka - The Fall of Omnius

Sortie de qualité après sortie de qualité, le petit label français Kaotoxin est en train de se faire une place de choix parmi les labels français qui comptent, un jeune label spécialisé dans la grande poésie contemporaine (Le Death et le Grind principalement) dont le roster rassemble un peu ce qu'il se fait de mieux dans l'underground brutal français.
Nouveau venu chez Kaotoxin, les auvergnats de Nephren-Ka, qui passent enfin le cap du premier album (après un premier EP, Revenge and Supremacy, remarqué et prometteur en 2010), avec The Fall of Omnius, qui, comme son titre l'indique, sera basé sur l'univers de Dune, plus précisément la trilogie sur la genèse de Dune, écrite par Brian Herbert et Kevin Anderson, qui se déroule donc avant (duh!) l'oeuvre originale de Frank Herbert, ce qui explique la pochette ornée d'une scène de bataille aux rayons lasers, des cymeks plutôt que d'un ver de sable perdu dans une immensité désertique, bref, ici c'est la guerre, le combat de l'homme contre la machine et le Jihad Butlérien, donc un terreau propice à un album de Death Metal brutal et technique...

Et là, tu sens déjà venir l'association d'idées bien foireuse, ça parle de Dune, Nephren-Ka (un nom d'ailleurs en complet décalage avec l'univers de Dune vu qu'il est tiré de Lovecraft) ça sent bon l'Egypte, les pyramides, le désert, les pharaons, et hop, Kamoulox! Nephren-Ka est un nouveau rip off de Nile, il faut aussi avouer que Nile ayant déjà utilisé ce nom-là dans ses catacombes, le raccourcis est plutôt facile, la réalité est, heureusement, fort différente.
Bien sûr, l'influence Nile est bien présente malgré tout dans le son du groupe, après tout, difficile d'éviter la comparaison quand on parle de Death Technique particulièrement dense comme c'est le cas ici, Nile étant une référence en la matière, mais Nephren-Ka n'est pas que ça, proposant un subtil mélange de Nile, Morbid Angel, Krisiun pour le côté Old School, voir aussi AngelCorpse pour la densité et le caractère étouffant de sa musique.
On va commencer par le petit défaut du disque, ce n'est peut-être qu'un détail mais qui a provoqué chez moi une certaine frustration; En dehors de son concept qui est flagrant au niveau des paroles et des titres des chansons, les atmosphères que l'on serait en droit d'attendre sont presque totalement absente, Nephren-Ka ne propose pas grand chose musicalement qui pourrait nous immerger dans le concept, à part deux-trois samples plutôt discrets (comme à la fin de Feydakins Storm), rien ne laisse penser que l'on écoute un disque basé sur Dune, Nephren-Ka pourrait se baser sur la première saison de My Little Pony qu'on y verrait pas la différence, c'est bien sûr un détail, mais j'aurais aimé que le concept transparaisse beaucoup plus dans la musique, peut-être plus d'atmosphère, des interludes pourquoi pas, surement plus de samples, c'est un peu décevant de ce point de vu là, mais comme je le répète, ce n'est qu'un détail, car après tout, c'est la qualité du Death que l'on juge ici, et en parlant de Tech Death bourrin et savoureux, Nephren-Ka a presque tout bon.
The Fall of Omnius est un assaut brutal et dévastateur, pas de répit, pas de quartier, une bonne bourrée auvergnate qui dépote sévère, concise, agressive, l'album est direct, étouffant, et tout en muscle, il n'y a pas trop de gras chez Nephren-Ka, pas trop de Doom qui dégouline de groove putride, les riffs son ciselés, tout en énergie et en dynamisme, une impression renforcée par une production qui lui va comme un gant, car après tout, Tu ne feras point de machine à l’esprit de l’Homme semblable, bref, les machines, c'est d'la merde, Nephren-Ka l'a bien compris et la production est assez très naturelle, très sèche et granuleuse, un peu à l'ancienne, chaque instrument est audible dans le mix, ayant toute la place nécessaire pour s'exprimer, la basse notamment a une place de choix, apportant un groove bienvenu et s'offrant quelques incartades techniques pas vilaines du tout, les riffs croustillent sous la dent, et la batterie tout en blast rugit furieusement, renforçant ce sentiment de dévastation et de destruction.
Dès Butlerian Jihad, on sait où l'on met les pieds, Blast beats, riffs aiguisés comme des lames de rasoir, et un bon gros growl bien caverneux qui s'extrait de la mêlée comme le commandeur en chez, autrement dit, ça poutre sévère, comme une affirmation de ce qu'est Nephren-Ka, car malgré cette avalanche de brutalité, les auvergnats savent se montrer très mélodique, bon, mélodique dans le sens du Death Metal, faut pas pousser non plus, mais mélodique quand même.
Brutal, direct, accrocheur, mais surtout très diversifié, car Nephren-Ka ne fait pas que bourrer comme un gros débile, et va nous proposer tout au long du disque un paquet de passages très différents, notamment de gros ralentissements ultra heavy et écrasant de lourdeur, sinueux et malsain comme à la  bonne époque de Morbid Angel, l'intro de Mastering the voice par exemple qui fait monter la pression avant l'attaque, l'intro basse/batterie de Feydakins Storm va vous briser la nuque, pour un titre qui se veut rapide, destructeur, avant de se faire plus sinueux et pesant par la suite, de la même manière, The Rise of Omnius, pourtant brutal, propose une alternance bienvenue et surtout un gros passage martial et guerrier.
En plus de ces changements de rythmes, cette densité et cette dimension écrasante et ultra heavy, Nephren-Ka n'oublie pas le Tech-Death et quelques passages typiquement techniques bien maîtrisés, qui confère à l'album une autre dimension et apporte ce surcroît de variété, comme ce passage tech sur Legend of Selim (Pt 1) qui fait son petit effet, ou encore le court et ultra-technique Legend of Selim (Pt 2), gros défonçage tech-death tout en virtuosité avec une basse très bien utilisé, c'est très court et ça tape dans le mille, par contre, Praise Shaï-Hulud est un peu trop linéaire et bas-de-plafond, sans trop de variations non plus, un peu le contraire d'un The Cymek Revolution qui lui sait se faire plus serpentant et mélodique après un bonne grosse attaque de Tech-Death.
Le groupe n'a pas peur non plus de se frotter aux titres de longue durée, en réussissant très bien à varier les plaisirs pour qu'à aucun moment on ne s'emmerde, le titre final To the Golden Path approche même les huit minutes, un peu un condensé de tout ce que sait faire Nephren-Ka, un titre la plupart du temps lent, parfois martial, mais avec des accélérations qui arrachent pas mal, notamment cette lead vers la moitié du titre, dommage pour la fin en fade out, le genre de truc pénible que je n'aime pas trop, mettez un point final bordel!

Solide, est le mot qui me vient à l'esprit pour résumer ce premier effort longue durée de Nephren-Ka, un Tech-Death brutal mais qui ne tourne jamais à la démonstration technique stérile, équilibré, suffisamment varié pour éviter toute forme d'ennui, les auvergnats frappe fort pour un premier album plutôt mature et réellement efficace, un subtil mélange de Nile, Morbid Angel, AngelCorpse ou encore Krisiun plus que recommandable pour les vrais qui veulent défendre la scène française.
Malgré tout, on aurait aimé que le groupe embrasse véritablement son concept et qu'il développe une personnalité un peu plus affirmée, c'est un peu dommage de ne pas vraiment ressentir la puissance du concept dans la musique du combo, même si par moments le caractère déshumanisé et guerrier de ce combat homme contre machine est plutôt bien rendu, peut-être pour la prochaine fois, le groupe semble avoir largement les compétences pour aller plus loin, quoiqu'il en soit The Fall of Omnius est un premier opus brutal et décoiffant, avec une vibe old school croustillante, bravo les gars...
(Vous pouvez écouter, et acheter aussi, tout ça chez Kaotoxin: http://listen.kaotoxin.com/album/the-fall-of-omnius)

Bourrée Auvergnate dans ta gueule!
Track Listing:
1. Butlerian Djihad
2. Mastering the Voice
3. Legend of Selim (pt.1: the Seeds of Discord)
4. The Rise of Omnius
5. Feydakins Storm
6. The Cymek Revolution
7. Legend of Selim (pt.2: the Return of the Worm-Rider)
8. Praise Shaï-Hulud
9. To the Golden Path