vendredi 23 août 2013

[Chronique] Annihilator - Feast

Il y a bien longtemps qu'Annihilator n'a pas sorti un Grand disque... oups, en fait Jeff Waters n'a pas sorti un disque à la hauteur de sa légende depuis... son premier album, Alice in Hell, et même si Never, Neverland était excellent, c'était un poil moins bien.
C'est un peu ça Annihilator, un groupe qui n'aura jamais confirmé les grands espoirs nés de son premier album, et dont la discographie ressemble à des montagnes russes, alternants entre une tripotée de daubes souvent dégueulasses (Refresh the Demon et Remains surtout) et une longue liste d'albums au mieux moyens voir à peine passables, même si Waking the Fury était plutôt bon malgré un son de guitare difficile à appréhender.
La constante n'a jamais été la qualité première de Jeff Waters, mais même s'il a usé un nombre assez incroyable de chanteurs et de musiciens en trente ans de carrière, difficile de ne pas trouver le bonhomme sympathique, une personnalité atypique, un type un peu cinglé, mais surtout un immense guitariste capable de quelques coups de génie de temps en temps.
Inconstante est la discographie d'Annihilator, et bien évidemment, inconstant sera son quatorzième album qui nous intéresse ici, Feast...

Miracle chez Annihilator, Jeff Waters n'a toujours pas viré Dave Padden, jamais dans toute l'histoire du groupe un chanteur n'était resté dix ans pour cinq albums de suite, et même si les débuts furent difficiles (Lol For You...), le gaillard s'est pas mal amélioré et s'intègre de mieux en mieux au son du groupe, il est surtout très versatile et son chant tout-terrain s'adapte bien à Feast, heureusement, car le cru 2013 d'Annihilator est très varié, au Heavy/Thrash traditionnel du combo canadien s'ajoute ici un paquet d'influences et de digressions qui donnent à chaque titre une personnalité propre, et ce n'est pas toujours une réussite.
Ça part pourtant sur les chapeaux de roues, avec Deadlock qui envoie une bonne mandale dans la gueule sans autre forme de procès, un titre direct, ultra heavy avec un riff assassin et un solo bien speed du père Waters, qui a également un petit côté martial à la Kreator, et vocalement une bonne surprise avec un Padden qui prend des intonations à la Tom Araya, malheureusement, le second titre va faire baisser la tension, il démarre bien No Way Out, la première partie est assez rapide, pas trop cependant, mais après un petit passage déstructuré on se retrouve avec une sorte de chant pop sur un Heavy/Thrash pénible à la Megadeth avant une ultime accélération histoire de finir sur une note positive, pas génial tout ça, et c'est à partir de là que ça va devenir un peu bizarre.
Déjà, Smear Campaign est une sorte d'hybride Hard rock/Thrash à la Metallica un peu speedé plutôt médiocre dans sa première partie mais qui va progressivement accélérer, c'est un peu le bordel sur ce titre, il se passe pas mal de truc mais avec ce sentiment que ça ne colle pas tout à fait, mais ce n'est rien avant No Surrender, qui voit Waters tenter de mélanger du Thrash avec du Primus, avec son intro funky étrange et sa grosse basse mise en avant, un Primus/Thrash haché et syncopé, avant une accélération thrashisante plus que bienvenue, s'ensuit un break atmosphérique très sombre et un solo qui sort un peu de nulle part, bref, c'est plus que douteux à écouter, c'est un peu la rencontre entre Annihilator, Primus et Infections Grooves.
Encore plus improbable, Danko Jones (déjà invité sur Metal en 2007) est de retour sur Wrapped, un titre de Metal hybride, une fois de plus, mélangeant Punk, Hard rock et Thrash, pour un résultat qui sonne de manière très bizarre, le Riff principal fait penser à du Helmet, c'est rapide, très direct, mais je dois bien avouer qu'on se demande un peu ce qu'on est en train d'écouter tellement ça sonne de manière étrange, un joyeux bordel tout ça, pas que ce soit véritablement mauvais, mais surement trop éloigné du son classique d'Annihilator.
Le véritable crime de Feast, il est là, avec la balade electro-acoustique Perfect Angel Eyes, une daube contenant tellement de guimauve qu'elle risque de vous donner du diabète après une seule écoute, pire encore, les paroles, c'est un ado Emo de 15 ans qui les a écrites ou quoi? "You're beautiful inside and outside too, A new beginning, me and you" ou encore "I know our love is strong, just cannot leave tonight", vous êtes sérieux les gars? vous vous foutez pas un peu de ma gueule là?
Heureusement, après ce pénible moment embarrassant, l'album va reprendre sur des sonorités un peu plus conventionnelles, Demon Code rentre pas mal dans le lard, à mi-chemin entre Metallica et Megadeth, avec une bonne louche de Groove par dessus, on regrettera juste une certaine longueur car le titre se répète un peu pendant six minutes, L'intro de Fight the world est très belle, mélodique, avant d'exploser, ça bourre et ça galope sévère, certains passages appuyés font penser à du Destruction, pour le coup la chanson est plutôt variée avec de nombreux passages mélodiques, un titre d'ailleurs issue des sessions de l'album précédent, Quant à One Falls, Two rise, c'est un titre de conclusion un peu bancal, tirant sur du slayer/Testament, avec ses hauts et ses bas, l'espèce de chant clair de Padden sur l'intro sonne trop pop/Rock, ça tabasse de manière correcte, mais les riffs sont un peu trop banals même si certaines interventions de Waters valent le détour pour leur côté Thrash mélodique classique et assez typique du groupe...

Si vous espériez un Annihilator donnant dans le Thrash pur et dur, vous allez être déçu, Feast est un peu un résumé de l'ère Padden, un peu de gros Thrash qui bourre, du Heavy, un soupçon de folie jazzy mais pas trop, une petite touche de groove, de la fusion expérimentale à la Annihilator quoi, pour un disque qui a au moins le mérite d'être varié.
Comme d'habitude, Waters est capable de nous pondre deux-trois gros titres, le reste étant à l'avenant, entre bizarreries fusion et titres à peine passables, histoire de perpétuer la longue tradition d'inconstance du groupe, Feast reste malgré tout plutôt agréable, parfois surprenant, parfois décevant, les solos manquent un peu de tranchant, ce qui est bizarre venant d'Annihilator, par contre le chant de Padden est plutôt bon, très versatile, et c'est une bonne surprise, surtout qu'il chante des textes vraiment très peu inspirés, dans l'ensemble, il y a moins de mauvais titres que d'habitude, c'est appréciable, mais franchement, cette balade, c'est juste pas possible, une faute de goût qui fait vraiment tâche.
(Notons que l'édition limitée est livrée avec un CD bonus de 15 titres dont un paquet de classiques ré-enregistrés et donc tous chantés par Padden, mouais, bof...)

Feast Fucking Annihilator
Track Listing:
1. Deadlock
2. No Way Out
3. Smear Campaign
4. No Surrender
5. Wrapped
6. Perfect Angel Eyes
7. Demon Code
8. Fight the World
9. One Falls, Two Rise